Phare de la vie sociale et culturelle du Morvan, Le Cornemuse était une destination naturelle pour la cinquième visite de terrain de l’Observatoire des citoyens, mardi 9 avril, sur le thème de l’accompagnement des jeunes. Un engagement prioritaire pour le Conseil départemental comme pour le trio qui dirige depuis 2019 le café-restaurant-salle de spectacles d’Arleuf. Dans ce village et dans beaucoup d’autres de la Nièvre, l’ouverture de lieux d’accueil destinés aux jeunes s’est imposée comme une façon de conjurer le destin et de réinventer un futur.
Ses façades tatouées de scènes joyeusement polychromes ralentissent les automobilistes dans Arleuf aussi efficacement qu’un radar pédagogique ou un coussin berlinois. Le Cornemuse fait partie des institutions esthétiques, culturelles et sociales du Morvan et de la Nièvre. Un lieu vibrant d’histoire, de ses vies passées d’Auberge de la Poste puis d’Hôtel de la Poste, dont le parquet résonnait des « guinguettes, des bals et des bœufs », comme l’a rappelé Marine Hadjuk, co-gérante avec Nicolas Petiot et Sylvain Vereycken—Lazou, en accueillant la visite de l’Observatoire des citoyens.
La nouvelle salle de concerts, construite à l’arrière du long bâtiment par les anciens propriétaires, a prêté ses flancs chauds et son plafond égayé de guirlandes d’ampoules multicolores à l’exercice rigoureux de l’évaluation des engagements pris par le Conseil départemental en faveur de la jeunesse. En préambule, Nicolas Petiot a brossé le portrait du Cornemuse et sa ligne directrice depuis la reprise par le trio d’amis, en 2019 : « L’ensemble du projet a été tourné sur la jeunesse, l’engagement et la formation. On accueille des services civiques, des stagiaires, des apprentis. On a également élaboré un programme, les Fondamentaux, où on appelle les gens à partager leurs savoirs, par exemple sur la cuisine, le cinéma, la forêt. Le but, c’est de permettre aux jeunes qui ne fréquentent pas Le Cornemuse de se réapproprier le lieu. »
Inscrits à l’École de la deuxième chance à Château-Chinon, trois jeunes covoiturés spécialement pour la soirée rappellent le principal frein aux déplacements : « On a entendu parler du Cornemuse mais ce n’est pas facile de se déplacer jusqu’à Arleuf. Avant ce soir, on n’avait jamais pu venir. » À défaut de résorber le problème lancinant, et intergénérationnel, de la mobilité, la visite de terrain a passé au contrôle technique les engagements pris par le Conseil départemental en faveur de la jeunesse. Parmi les avancées issues d’Imagine la jeunesse, les 100 000 € du Budget participatif nivernais consacrés depuis l’an dernier aux projets portés par des jeunes ont suscité l’intérêt et l’approbation. Quant à la démarche Collège de demain, elle devrait faire émerger des locaux vacants dans les 30 collèges publics qui appartiennent au Conseil départemental. « Miracle » de la réflexion collective, le manque de salle de musculation pour les jeunes à Château-Chinon a trouvé des éléments de dénouement en quelques minutes : « On pourrait imaginer que le matériel soit financé grâce au Budget participatif et qu’un local soit trouvé au collège ? » Le service Jeunesse du Conseil départemental s’est porté volontaire pour épauler les candidats dans le montage de leur projet.
Lister les locaux vacants dans les villages, paraît nécessaire, mais si l’identification des besoins semble encore plus urgente : « Si on fait une belle carte des lieux disponibles, mais sans projets, ça sera stérile. Il faut questionner les besoins auprès des professionnels de la jeunesse et des jeunes eux-mêmes. » La réinvention des villages, avec l’appui inespéré de leur jeunesse, s’est poursuivie autour des charcuteries et fromages du cru.
Ils ont dit
Marie-Pierre : « Il faudrait recenser et cartographier en urgence tous les lieux qui existent pour les jeunes. On a des gamins à la campagne qui demandent « qu’est-ce qu’on fait le dimanche ? » ou qui passent leur temps sur les écrans. Il faudrait pouvoir leur proposer autre chose. »
Marcel : « Cela pourrait être sympa d’avoir une salle dans laquelle on pourrait partager les savoirs. Moi, par exemple, j’aimerais bien faire du montage numérique de photos, et je ne sais pas. »
Florian : « Oui, ce serait une bonne idée, un lieu intergénérationnel. Nous, les jeunes, on pourrait donner des cours d’informatique, et les vieux nous parleraient de leur vie. Ça pourrait faire un chouette truc. (…) Le Budget participatif nivernais, pour les jeunes c’est intéressant : il y en a beaucoup qui commencent à monter leur entreprise parce qu’ils ne supportent pas d’avoir un patron. »
Kylian : « J’ai eu la chance d’être formé au montage de projets par Le Cornemuse et l’association Tortuga, pendant mon service civique. C’est un domaine hyper important. Si on veut avoir un département dynamique, des villages qui se bougent, il faut que les jeunes soient formés. Grâce à ce que j’ai appris ici, j’ai pu monter une association de jeunes, à Luzy, et on crée nos propres événements. »
Aurélie : « Cela peut être intéressant d’avoir un lieu pour les jeunes en plein centre d’un village. Quand on habite à 3,5 km du bourg, on ne voit pas trop ce que font nos enfants, on serait plus tranquille avec un lieu comme ça. On devrait en parler dans nos mairies, de l’existence d’un endroit comme Le Cornemuse, ça pourrait donner des idées. D’ailleurs, il y a des maires qui attendent aussi qu’on leur présente des projets, et qui sont prêts à les accompagner. »